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Vanessa est partie pour plusieurs mois en voyage en Amérique du Sud à vélo ! Elle nous raconte aujourd’hui son périple depuis La Paz et Uyuni à vélo, en passant par le Chili. Une étape où elle a vécu le meilleur comme le pire mais qui lui a confirmé que chaque obstacle trouve sa solution dans l’entraide et la collaboration !
Le défi ? 5 jours et 200 kms au cœur d’une réserve naturelle chilienne
Initialement, je voulais voyager seule, mais les événements ont fait que j’ai rencontré Tata et Toti, mère et fils mexicains et Juan de Colombie. L’un des arguments de Toti pour m’encourager à poursuivre le voyage était que je devais à tout prix aller pédaler sur le Salar d’Uyuni. Alors évidemment, en traversant la frontière bolivienne, la perspective de découvrir enfin ce fameux désert de sel était à son maximum. C’était parti pour La Paz à Uyuni à vélo !
Le défi ? Sur les 700 km à parcourir, plus de 200 se trouvent en dehors de toute route goudronnée et en complète autonomie. Pour moi, qui ai traversé l’Équateur et le Pérou toujours sur les routes principales, cette nouvelle aventure en dehors des sentiers battus m’enthousiasme énormément et ce trajet de La Paz à Uyuni à vélo s’annonce mémorable !
Début de l’aventure de La Paz à la frontière chilienne, première épreuve
Nous voilà donc partis, ma petite famille cyclovoyageuse, Tata, Toti, Juan et moi, en direction de la frontière chilienne. On emprunte les routes principales, on pratique nos premiers feux et campings sauvages et on fait le plein de nourriture pour les 5 jours en autonomie où nous prévoyons de pédaler.
Le matin du passage de la frontière, nous nous réveillons avec une vue magnifique sur le Mont Sajama. La journée commence bien, mais en milieu de matinée, première casse, c’est le porte bagage avant de Tata. On fait une réparation de fortune et je récupère le bidon de 5L d’eau pour alléger le poids que supporte la structure fragilisée. À 11h, nous sommes presque à Tambo Quemado, ville frontalière avec le Chili. Les 8 derniers kilomètres sont beaucoup plus difficiles que prévus. Un faux plat trompeur et surtout un léger vent contraire nous complique la tâche.
Nous faisons une pause de 3h à Tambo Quemado, le temps de déjeuner et réparer le porte bagage cassé, on se sent tous requinqués, prêts à pédaler les 7 derniers kilomètres qui nous séparent du Chili. Il est 14h. Il nous reste 7 km à parcourir, mais de pure montée. À ce moment-là, je me mets en conditions mentales. Oui, cela va être difficile, mais petit à petit et à mon rythme j’atteins toujours les cimes, avec la fierté d’y être arrivée !
Malheureusement pour nous, le vent décide de s’en mêler et au moment où Juan crève sa roue avant nous n’avons parcouru que 2km et il s’avère impossible de remonter sur le vélo tellement le vent est fort. On fera le reste de la montée à pieds. 5km, 300m de dénivelé et 2h20 à pousser le vélo. À chaque virage on croit (on espère !) que la pente va se calmer. Mais non, on devra pousser le vélo jusqu’à la frontière, jusqu’au tout dernier kilomètre. Et le vent ne nous laissera pas en paix une seule seconde.
Nous atteignons la frontière à 17h20 et la passons sans encombre, mais c’est long. Il faut enregistrer les vélos, tout décharger, passer les sacoches dans la machine à rayons X et tout remonter ensuite. Quand nous sortons de la migration, le soleil commence à descendre, nous sommes à 4750m d’altitude. Il n’y a que des montagnes autour de nous et toujours du vent. C’est magnifique mais il est impossible de camper ici cette nuit. On parcoure les 7km et 300m de dénivelé inverse pour arriver à Chungara, où on fera la rencontre de « carabineros » (sorte de gendarmes chiliens). Ces derniers nous offrent de quoi nous héberger pour la nuit. Après une dure journée on dormira finalement dans des lits et bien au chaud.
À ce moment-là, on ne savait pas que les prochains jours allaient se révéler bien plus difficiles encore que cette première épreuve, et notre aventure de La Paz à Uyuni à vélo ne faisait que commencer …
Maladie et casse de matériel, les 4 jours de l’enfer !
Le lendemain matin, nous étions frais et dispos, prêt à affronter nos 5 jours en dehors des sentiers battus et en totale autonomie. À ce moment-là, nous transportions un peu plus de 10L d’eau, des biscuits, un peu d’avoine et des pâtes, quelques sucreries pour réchauffer le cœur et surtout du riz. 9kg de riz qui allaient être la base de notre alimentation : petit déjeuner, déjeuner et dîner…
Si nous avions prévu de faire 40km par jour, les 2 premiers nous faisons en tout et pour tout 35km. Tout d’abord, car les chemins de terre s’avèrent être de sable, nous obligeant à pousser le vélo… Et quand nous sommes en descente, je n’en profite pas plus car je suis très stressée. Je ne suis pas une cycliste de montagne et je dois avouer que je ne suis ni vraiment à l’aise, ni très douée sur un vélo en dehors de la route. Ces 2 premiers jours je vais tomber plusieurs fois…
D’autre part, le premier matin Tata est prise de frissons sans raison. Il s’avère qu’elle a attrapé une infection. En plus de se sentir mal, elle commence à angoisser, ce qui se comprend quand on sait que le premier médecin est soit en Bolivie, soit à plus de 170km au sud ! Le 2nd jour, Tata craque. Elle souffre de son infection et les frissons reprennent. Je reconnais rapidement les symptômes d’une crise d’angoisse. Heureusement, j’avais déjà été confrontée à ce type de crise par le passé et réussi à la tranquilliser à coups d’exercices de respiration. Nous décidons alors de nous faire avancer au maximum pour rejoindre une ville plus grande et trouver une pharmacie. Tant pis pour l’aventure en autonomie la santé passe avant tout !
Ainsi, le matin du 3ème jour nous montons dans un camion qui nous avancera finalement que jusqu’au Salar de Surire, 50km plus loin. Il nous reste alors plus de 120 km à parcourir. Ce trajet de La Paz à Uyuni à vélo nous réserve bien des surprises !
Nous faisons la connaissance d’un nouveau groupe de « carabineros », ces derniers ne pourront pas nous avancer plus mais nous permettent de remplir nos bouteilles d’eau et nous offrent suffisamment à manger pour compenser le retard que nous avons pris. On pourra agrémenter notre riz avec des oignons, des carottes et même se faire plaisir avec quelques biscuits !
Nous reprenons donc notre route nous arrivons sur un chemin de terre où il nous est facile de rouler !!! Malheureusement cela ne m’empêchera pas de crever en plein milieu de l’après-midi… Malgré ce contre temps, la journée est plutôt bonne et le terrain nous permet de profiter du paysage et de d’observer pour la première fois un désert de sel.
Au 4ème jour les choses commencent à se compliquer réellement (comme si les premiers jours avaient été une promenade de santé) ! La journée s’annonçait dès le matin difficile avec une montée de 20km pour atteindre la limite régionale d’Arica. Et le sable était de retour ! À ce moment-là, la chaîne du vélo de Tata commence à jouer des siennes et quelques kilomètres plus loin, le dérailleur finit par lâcher ! On essayera de le réparer mais il n’y a rien à faire. La conséquence est immédiate. Tata ne peut plus avancer en pédalant. Le reste de la journée se fera en marchant et on atteindra la cime en fin de journée. Cette nuit-là, nous campons sur notre point le plus haut depuis le début du voyage, à plus de 4760 m d’altitude. Le lendemain il s’agira de trouver une solution pour le vélo de Tata et les 100km qu’il nous reste avant de rentrer à nouveau en Bolivie… Cette aventure de La Paz à Uyuni à vélo est de plus en plus ardue !
Dépasser les obstacles grâce au groupe et à l’entraide
Voilà 5 jours que nous avons commencé l’aventure. Nous devions être à nouveau à la frontière entre le Chili et la Bolivie mais les divers problèmes de santé et casse de matériel nous ont retardé. Nous ne disposons pas des outils nécessaires pour réparer le vélo de Tata et lui permettre de pédaler. Pour la première partie de la matinée cela ne pose pas de problème puisque nous descendons 300m sur 5km. Pour ma part l’entraînement sur chemin de terre commence à faire son effet, je ne tombe pas une seule fois et commence même à prendre de l’assurance.
Au bout des 5 km, le terrain est à nouveau plat et Tata ne peut plus avancer. Nous décidons alors d’attacher le vélo aux portes bagages arrière du vélo de Juan et du mien. Et ainsi commence la seconde partie de notre aventure à vélo de La Paz à Uyuni comme chevaux d’attelage !
Cette partie de la réserve naturelle est particulièrement belle et nous passons du Parc national de Lauca au Parc d’Isluga. Par moment, nous traversons des vallées dignes du décor du Seigneur des Anneaux. En revanche, sur cette partie du périple, les cours d’eau se font rares. Ainsi nous saisissons chaque opportunité pour remplir nos bouteilles que ce soit dans un cours d’eau ou en arrêtant les rares voitures qui croisent notre chemin. Ce jour-là nous avons fait LA rencontre du voyage ! Trois chiliens en vadrouille dans la région nous offrent non seulement 6L d’eau mais s’émeuvent de nos péripéties des derniers jours et commencent à nous offrir tout ce qui leur tombe sous la main : tomates, oignons, carottes mais également avocat, cœur de palmier, fruits en conserve, chocolat, bière et même une bouteille de vin chilien !!
Des mets que nous n’avions pas dégustés depuis un bon petit moment. Grâce à eux les jours suivants ont été un peu plus savoureux et en tant que bonne française, si les repas sont bons, la motivation est au beau fixe !
Au 8ème jour, nous arrivons enfin à la frontière chilienne. Malgré toutes nos encombres on l’aura fait, et tous ensemble !! Ce passage à nouveau en Bolivie nous apparaît comme une victoire, nous sommes proches du salar d’Uyuni ! À ce moment-là, les difficultés nous paraissent derrière nous. Après avoir tiré Tata sur 70 km de chemin de terre, nous allons enfin pouvoir réparer le vélo et reprendre la route sereinement. Enfin ça c’est ce que nous croyons. Ce que je ne savais pas à ce moment-là, c’est que dans les jours suivants j’allais vivre une des journées les plus difficiles de tout mon voyage…
Retour en Bolivie et désert de sel ou comment se dépasser physiquement et mentalement
Notre entrée en Bolivie commence par une mauvaise nouvelle… Il est impossible de trouver un atelier de réparation. Il faudra donc continuer à tirer Tata sur son vélo mais il nous reste encore 300 km avant le ville d’Uyuni.
Notre attelage se transforme en « rennes du Père Noël » car nous avons enfin atteint notre premier désert de sel, le Salar de Coipasa ! Il est vraiment très étrange de pédaler sur cette croûte blanche. Et même si mon mental a bien conscience que nous sommes sur une couche épaisse de sel, mon instinct ne peut s’empêcher de faire le rapprochement avec un immense lac gelé et me maintient en alerte permanente. Comme si le sol pouvait se rompre sous nos pieds et nous engloutir, nous et nos vélos.
Le jour suivant, nous faisons notre première grande traversée du Salar. Cette immensité de sel fonctionne exactement comme une mer, avec ses îles de terre. Nous devons rejoindre une de ces îles, à 40km plus au sud. Sur les cartes il est indiqué des chemins, dans la réalité nous ne les trouverons jamais. Nous allons donc traverser en plein milieu, en nous guidant seulement au GPS. Le terrain est particulièrement difficile et ressemble à une espèce de neige de printemps qui aurait gelé à nouveau. Les vibrations qu’on ressent dans le guidon deviennent insupportables au fur et à mesure que la journée avance.
Malgré tous nos efforts nous allons mettre plus de 7h à atteindre notre objectif. Nous terminons la journée en marchant. À 5km du point d’arrivée, le terrain redevient du sable et le chemin ne cesse de nous faire faire des zigzags. Nous avançons tous en silence, chacun renfermé dans son monde intérieur pour continuer d’avancer.
À 2km de l’arrivée, on aperçoit enfin au loin des toits de maison et des reflets de voitures en mouvement. Nous arriverons ce jour-là à 17h30. Entre soulagement d’être arrivée et exténuation, je suis sur le point de craquer. Cette nuit-là, la fatigue me fera faire d’horribles cauchemars. Ce fût définitivement la journée la plus éprouvante de tout le voyage.
Fatigués physiquement et psychologiquement, les 2 jours suivants nous allons nous faire avancer sur plus de 150 km en stop et en bus. On veut à tout prix trouver un atelier et pouvoir réparer le vélo de Tata. Ainsi, au matin du 12ème jour, un bus nous dépose sur l’île d’Incahuasi, en plein coeur du Salar d’Uyuni ! Le vélo de Tata n’est toujours pas fonctionnel, mais les 2 jours de repos nous ont permis de retrouver des forces et nous avons décidé que nous pédalerions les 115 derniers kilomètres qui nous séparent du village d’Uyuni.
Une aventure collective qui se termine en beauté
Cette fois-ci le destin sera en notre faveur. Tout d’abord nous faisons la connaissance d’une famille Suisse en excursion touristique dans le Salar, qui partage avec nous leur petit déjeuner. Thé, café, yaourt, céréales, tartines, etc. Après pratiquement 2 semaines à base de riz, c’est un vrai festin qui s’offre à nous !
Puis, nous faisons la rencontre incroyable d’un groupe de 30 cyclistes qui descendent de Quito (Équateur) à Ushuaia (Argentine) accompagné de toute une assistance technique et surtout mécanique !!!! Enfin ! Après 7 jours et près de 200km, c’est au milieu de nulle part, en plein cœur du Salar d’Uyuni que nous recevons l’aide tant espérée. C’est ainsi que sur les 2 derniers jours de traversée, nous avons tous pu pédaler et profiter du célèbre Salar d’Uyuni, cette étape incontournable que je n’aurais jamais découvert si je n’avais pas pris la décision de poursuivre mon voyage jusqu’à Ushuaia. Depuis La Paz à Uyuni à vélo, cette aventure s’est révélée pleine de rebondissements !
À la fin du 14ème jour, nous sommes enfin arrivés à la « Casa Cicilista Pinguï » d’Uyuni, certes fatigués, et pour ma part avec 4 rayons en moins et mon porte bagage avant dessoudé, mais avant tout heureux d’avoir réussi cet incroyable défi collectif et des anecdotes et paysages plein la tête.
Ainsi se termine le récit de cette incroyable traversée que nous avons vécue, depuis la Paz à Uyuni à vélo, en dehors des sentiers battus et en plein cœur d’une nature qui nous aura émerveillé à chaque instant. Cette épopée de 15 jours nous aura énormément appris, en tant que voyageur à vélo, en tant que personne et également groupe, continuant de nous inculquer des valeurs de dépassement de soi, d’entraide et d’humilité.
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